Article sur le multicaméra publié dans Caméra Vidéo n° 148 avril 2001

Cette page est la reprise de l’article publié dans Caméra Vidéo n°148 du mois d’avril 2001
L’enregistrement multicaméras est un genre particulier de la vidéo au même titre que le reportage ou le tournage d’une fiction. L’association CTV alterne les genres et pratique depuis quelques années déjà, le tournage multicaméras et nous fait part ici de son expérience en ce domaine.
Introduction
Le tournage multicaméras consiste à mélanger en
temps réel avec un pupitre (régie vidéo) plusieurs
images vidéo issues de différentes caméras qui filment
la même scène depuis différents endroits et ceci au
cours d’un événement en public. Une émission de variétés
est l’exemple typique du tournage multicaméras. Les images sont
soit enregistrées, soit projetées sur un écran géant.
C’est un travail d’équipe où il y a peu de place pour l’erreur,
d’où des moments forts.
Principe du tournage multicaméras
Tout d’abord, quelques semaines auparavant, il y a la prise de contact
avec les organisateurs de la manifestation publique. Cette
manifestation
peut être soit un talk show (cas présent), soit un spectacle
(théâtre, musique, danse), soit encore une rencontre sportive.
Le tournage multicaméras est une opération lourde qui
mérite une rétribution. Cette rémunération
permet à l’association d’investir dans de nouveaux matériels
et de réparer les anciens appareils. Il faut l’expliquer au
commanditaire
et envisager le mode de rétribution. En général, il
s’agit d’une somme forfaitaire conclue à l’avance, le commanditaire
ayant alors la charge de la duplication des cassettes.
Il faut constituer l’équipe technique. Elle est constituée
de 4 à 6 personnes : 2 personnes en régie le réalisateur
et son aide à tout faire (titre, son, magnétoscope, et interventions
techniques à chaud) et 2 à 4 cadreurs.
Ensuite, hormis les rencontres sportives en plein air, il y a la prise
de contact avec le régisseur son, et le régisseur lumière.
Ce sont, en règle générale, des professionnels du
spectacle et il faut ménager leurs susceptibilités car la
vidéo est souvent considérée comme un intrus, source
de travail supplémentaire. La négociation de l’emplacement
de la régie est une phase délicate.
Enfin, notamment dans le cadre d’un spectacle, il faudra assister aux
répétitions générales pour anticiper pendant
l’enregistrement. Si l’équipe vidéo est en place avec son
matériel avant la “ répet ”, c’est encore mieux. Nous demandons
toujours à l’organisateur un conducteur détaillé de
son spectacle.
Tournage le 14 décembre à Corbeil
Ce tournage consiste à filmer la cérémonie de
la remise des trophées de la création d’entreprises sur Corbeil
Essonnes, à présenter les 4 lauréats sous forme
de reportages tournés et montés auparavant, et à assurer
une liaison vidéo avec 2 villes jumelées en Allemagne et
en Espagne.
Jour J, rendez-vous à 15 h 00 au local de l’association pour
le chargement du matériel dans les véhicules (évitez
les autos sportives à 2 portes). Vérification de la liste,
tout y est, départ pour Corbeil Essonnes et son théâtre.
15 h 30 : arrivée au théâtre de Corbeil : recherche
du régisseur
15 h 45 : après ¼ d’heure de recherche, nous pouvons
commencer à décharger et à monter le matériel
jusqu’à la régie. Le projectionniste vidéo nous demande
un coup de main pour monter son vidéoprojecteur. C’est un modèle
de très haut de gamme qui “ crache ” 8000 lumens et qui pèse
90 Kg. On aura intérêt à assurer pour la qualité
d’image…
Première difficulté, il y a pas d’emplacement prévu
pour la régie vidéo, il faut négocier. Dans la pièce
voisine, il y a une grande table qu’il faut débarrasser, puis déménager
pour pouvoir s’installer.
Le cœur du dispositif (les régies vidéo et audio)
Nous commençons par câbler la régie vidéo
et nous plaçons les différents éléments. Nous
avons à gérer 7 sources : 4 caméras, un magnétoscope
DV (Panasonic NV 10000), un titreur Amiga, et le signal vidéo France
Télécom qui nous permet d’avoir un triplex avec l’Allemagne
et l’Espagne (système visioconférence). Il faut un moniteur
par source (4 caméras, le magnétoscope DV pour les reportages,
la titreuse soit 6 moniteurs plus le final). Pas de moniteur pour le
triplex
France Télécom, le technicien est juste à côté
avec son matériel. Le cœur du dispositif est le mélangeur
Panasonic WJ AVE 5 associé au prémélangeur de fabrication
maison. Ce prémélangeur a pour but de sélectionner
deux sources parmi six entrées possibles (4 sont utilisées
dans le cas présent), la console Panasonic assurant le mélange
entre les deux sources. En effet, en vidéo, il n’est pas possible
de commuter deux sources avec un simple interrupteur car il y a alors
une
perte de synchronisation, qui se caractérise par une image déchirée
pendant une fraction de seconde. La seconde fonction de ce prémélangeur
est d’assurer la communication entre le réalisateur et les cadreurs.
Dans notre configuration, les 4 caméras arrivent sur le prémélangeur
en vidéo composite, puis transitent par la console Panasonic. Ensuite,
le signal est envoyé en YC vers la Vidéonics MX Pro DV, qui
recevra également le signal DV du magnétoscope, et le signal
vidéo composite France Télécom. Le signal final est
enregistré sur un magnétoscope S-VHS et est envoyé
vers le vidéoprojecteur et vers le triplex France Télécom
en vidéo composite.
Les caméras (choix des emplacements et ce qui à trait
aux spécificités du tournage multicaméras)
Pendant ce temps, l’autre partie de l’équipe installe les caméras,
en commençant par le déroulement des câbles. Ceux-ci
doivent suivre un cheminement en conformité avec les règles
de sécurité (pas de câbles au sol sans protection pour
les spectateurs). Nos câbles de fabrication maison véhiculent
le signal vidéo de la caméra, le 220 V pour l’alimentation
des caméras et l’intercom. Les caméras sont en réalité
les camescopes des adhérents qui apportent ainsi leur
contribution
au fonctionnement de l’association. Pour fonctionner en mode caméras,
il faut bien lire le manuel car chaque modèle se configure différemment
et c’est un vrai casse-tête. Les caméras doivent être
placées de façon à ce que chacune d’elles puisse offrir
un plan différent. Une caméra (Sony DCR PC 100) est disposée
au fond de la salle derrière le public, ce sera la caméra
de plan général. Deux autres caméras (Panasonic NV
DX 100) assureront les plans de proximité, elles sont plus proches
de la scène, donc légèrement sur les cotés
à hauteur de scène.
(Si l’emplacement des caméras sur le coté pose trop de
problèmes mieux vaut alors placer, trois caméras côte
à côte en fond de salle. Les camescopes actuels ont des optiques
suffisamment puissantes pour réaliser d’excellents plans à
grande distance.)
Enfin, la caméra portable (Canon XL1) située sur la scène
assurera des plans très rapprochés.
Au cours du tournage, les cadreurs doivent être en mesure de
proposer en permanence un plan intéressant au réalisateur.
Hormis un ordre précis du réalisateur, il devra profiter
du moment où il cesse d’être à l’antenne pour rechercher
un nouveau plan. Lorsqu’il est prêt, il attend que la réalisateur
diffuse son plan pour passer à la recherche d’un nouveau plan.
La prise de son
Il est indispensable de bénéficier d’un repiquage audio
de la sonorisation de la salle. Il est hors de question de faire un
tournage
multicaméras avec uniquement le son d’ambiance. C’est le point le
plus difficile, car certains sonorisateurs ne sont pas toujours
capables
de fournir le son qu’ils diffusent en salle. Celui de ce soir coopère
volontiers, mais il faut adapter nos connectiques aux siennes. Dans nos
caisses se trouvent des kits de connexion audio pour faire face à
toutes les configurations possibles. On n’oubliera pas d’intercaler un
transformateur d’isolation qui permet d’avoir les masses séparées
entre les régies audio et vidéo. Le signal issu de la console
est mélangé avec celui des micros d’ambiance. La mixette
qui se trouve sur le mélangeur Panasonic WJ-AVE5 convient parfaitement,
le son est ensuite envoyé au magnétoscope. Celui-ci doit
avoir un contrôle automatique du gain car au cours d’un tournage,
il y a des écarts de niveau sonore. En ce qui nous concerne, nous
avons résolu le problème en transitant par l’excellente section
audio d’un vieux magnétoscope stéréo Philips.
Pour le tournage d’aujourd’hui, nous devons en outre fournir le signal
audio en provenance de notre magnétoscope DV. Le sonorisateur assure
le brassage des différentes sources et les répartit grâce
au système de sous-groupe dont il dispose sur sa console.
La communication entre les cadreurs
Indispensable, lors d’un tournage multicaméras, l’intercom permet
de diriger les cadreurs et de leur indiquer lorsqu’ils sont à l’antenne
(absence de tally). Nous avons retenu, un système de fabrication
maison qui consiste à amplifier et à distribuer dans des
casques audio fermés (coût environ 50 Frs pièce) le
signal issu d’un micro. Nous avons exclu les systèmes de liaison
H.F. peu fiable et sensibles aux interférences.
Le direct proprement dit
20 h 30, ça y est, ça démarre, on panique un peu,
ça ne passe pas toujours comme prévu, on n’a pas eu le temps
de répéter, il faut improviser. Les images viennent de partout,
on ne sait pas laquelle choisir, les réflexes ne sont pas encore
aiguisés, la tension monte. “ une image est intéressante
sur le moniteur 3 … trop tard c’est déjà fini … vite la plan
général … mise au point sur la 2, ton sujet est flou … stabilise
la 1 … top t’es à l’antenne ... Francis le titre … c’est bon
…le scope est calé pour le deuxième reportage ?”. Puis au
bout de quelques minutes, l’équipe est échauffée et
le stress retombe. On travaille sans filet et les images sont mixées
en temps réel pour être enregistrées et diffusées
sur le vidéoprojecteur - on ne pas peut revenir en arrière.
Le titreur Amiga "plante", c’est la première fois que cela arrive
pendant un direct, un titre ne sera pas envoyé à l’antenne.
Ensuite tout va bien, mais on est en avance sur l’horaire, on nous
demande
les correspondants en Espagne et en Allemagne mais la liaison France
Télécom
n’est pas encore opérationnelle. La tension monte en régie.
Pour gagner du temps, on diffuse les reportages prévus un peu plus
tard. À la fin l’animateur relance un peu le débat pour faire
durer. Enfin les images arrivent, le triplex fonctionne à merveille.
Tout le monde est sur scène et salue le public, plan général,
top générique de fin, fondu au noir, la soirée est
terminée..., presque, il faut maintenant ranger le matériel.
Le montage ultérieur, la duplication
Dans le cas présent, il n’y pas de montage à faire, tout
l’enregistrement est dupliqué pour être ensuite distribué
aux différents partenaires et sponsors de la soirée. Dans
le cas d’un spectacle où il y a des temps morts entre chaque scène,
l’enregistrement brut est effectué en DV, puis monté en virtuel
où ces temps morts sont supprimés et les titres sont ajoutés.
Le produit final en Dv est expédié chez un duplicateur professionnel
qui allie qualité et rapidité à un prix raisonnable.
Auparavant, nous exécutions nous mêmes les duplications
pour les « clients ». Nous disposions alors un magnétoscope
S-VHS lecteur qui diffusait via un TBC à une chaîne de 5 magnétoscopes
VHS de salon montés en cascade. Le TBC était là pour
récupérer la dégradation des signaux de synchronisation
inhérents à la mécanique des magnétoscopes.
En convertissant en entrée le signal vidéo analogique composite
en un signal numérique et inversement en sortie, le TBC introduit
une légère dégradation de l’aspect de l’image largement
compensée par la stabilité temporelle de celui-ci. Cette
technique comportait trop de contraintes puisse qu’elle nécessitait,
non seulement, une longue surveillance continue de l’avancement des
copies,
mais aussi, obligeait à un contrôle régulier de la
qualité de celles-ci.
5 encadrés (spécifier "encadré 1, 2, 3, 4, 5" donc)
De l’utilité du fer à souder
Il n’existe pas dans le commerce de matériel grand public destiné
au tournage multicaméras. Il faut donc s’en fabriquer une partie.
Les câbles et la connectique ne posent pas de grosses difficultés.
Il y a de grands avantages à réaliser soit même les
câbles de liaison de la régie aux caméras. Et ceci
pour au moins deux raisons :
1) le coût : un câble 75 ohms de 25 mètres de longueur
coûte moins de 150 F à réaliser soit même,
2) l’assurance d’un produit adapté à ses besoins.
Le seul frein est la raréfaction des comptoirs de vente au détail
de composants électroniques. L’électronique est devenue une
technologie ultra complexe et trop coûteuse en terme de gestion de
stock.
Pour la réalisation de l’intercom, les amplis dotés de
la fonction karaoké conviennent parfaitement. Il suffit brancher
les casques sur la sortie haut-parleur en prenant soin d’intercaler en
série une résistance de 220 ohms sur chacun des casques.
La réalisation du “ prémélangeur ” appareil incontournable
est plus délicate et dépasse le cadre de cette revue. De
plus, nous n’avons pas rédigé de documentation à ce
sujet. L’amateur pourra rechercher sur des catalogues, des baies de
commutation
de sources, mais il s’agit de matériel à usage professionnel
assez coûteux.
L’autre utilité du fer à souder est de pouvoir réparer
“ à chaud ” une connectique défaillante. Le multimètre
est également le bienvenu pour vérifier les câbles.
Très apprécié également le lecteur de CD portable
qui contiendra un CD gravé avec des signaux de test. Le sonorisateur
effectue et règle très rapidement par rapport à la
régie vidéo.
La Videonics MX ProDV
À l’occasion
du talk show, que nous avons réalisé le 14 décembre,
nous avons eu l’occasion de tester la console de mélange Vidéonics
MX ProDV. L’audio étant traité à part, seule la partie
vidéo a été testée.
On pourra retenir les points suivants :
Points positifs :
+ premier mélangeur DV grand public sur le marché
+ le paramétrage par menu de chaque entrée ( DV, YC,
vidéo composite)
+ qualité d’image parfaite même en vidéo composite
+ changement d’image rapide (beaucoup mieux que la Videonics MX 1)
+ maniement agréable
+ visualisation des 4 entrées sur un seul moniteur, la source
sélectionnée ayant une bordure de couleur.
Points négatifs :
le prix ( notamment dû à un dollar élevé
et des codecs Dv fabriqué en exclusivité par Sony )
l’absence de connectique pour les moniteurs de contrôle
la qualité des images de contrôle est trop faible, et
cela devient vite fatiguant. Pourquoi ne pas envisager une connectique
de type moniteur VGA.
nombre d’entrées DV limité à 2, c’est insuffisant
pour un tournage multicaméras
trop d’effets spéciaux de transition (le mélangeur
WJ AVE 5 de chez Panasonic possède 96 effets et nous les avons jamais
utilisés). Le fondu enchaîné, le fondu au noir, et
le “ cut ” suffisent. Les effets spéciaux trouvent leur place dans
une configuration de montage virtuel pas dans un direct !
titreuse propriétaire, il serait intéressant de pouvoir
y connecter un PC ou un Mac portable (connectique type VGA).
Les relations avec le "client"
Les relations sont généralement bonnes ; en effet cette
activité reste pour nous un loisir. Il y a toujours la notion de
plaisir dans ce que nous faisons, nous ne démarchons pas, les clients
viennent à nous par relation. En général, le client
est une collectivité locale ou une grosse structure associative
telle l’Agence Performance. Le client sait que nous ne sommes pas des
professionnels
et cela aurait plutôt tendance à les détendre.
Tout en étant activité de loisir, cela reste sérieux ;
aussi lorsque nous prenons un engagement vis à vis d’un client,
nous devons le tenir. Cela nous paraît être le point le plus
important. Nous sacrifions parfois des week-end entiers à la vidéo.
Mais, il nous est déjà arrivé de refuser un travail,
car nous ne pouvions assurer la prestation techniquement. Cette
activité
vidéo nous permet de rencontrer des gens très différents
; non seulement cette activité est enrichissante sur le plan
strictement
vidéo et technique, mais également sur le plan humain.
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