Mediakwest - Retransmissions sportives - Plongée dans le monde des intermittents

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Retransmissions sportives - Plongée dans le monde des intermittents

Par Bernard Poiseuil le 11 novembre 2016

Au lendemain des temps forts de l’année sportive (Roland-Garros, Euro de foot, Tour de France, JO de Rio...), plongée – en trois parties - dans le monde précaire et hétérogène des intermittents qui travaillent à la retransmission des compétitions.*

Du 10 juin au 10 juillet, à l’occasion de l’Euro de football, l’heure était à la mobilisation. Des vingt-quatre équipes finalistes, bien sûr, et de leurs milliers de supporters en villégiature en France, mais aussi des 1 900 professionnels, intermittents pour la plupart, en charge de la production de l’événement et... des inspecteurs du travail.

« Nous sommes prévenus que des contrôles seront menés à l’IBC et sur les stades afin de s’assurer que tant les prestataires d’UEFA Euro 2016 – la société créée pour l’occasion – que les diffuseurs présents sur place respectent la législation française en la matière », annonçait Franck Choquard, directeur d’European Production Coordination (EPC/Eurovision), une structure créée en 2008 par l’Union européenne de radio-télévision (UER), quelques jours avant le début de la compétition.

Que ce type d’événement puisse favoriser les entorses au droit du travail (un jour de repos par semaine et une durée maximale hebdomadaire de 48 heures, ou 60 heures par dérogation) n’a en réalité rien d’étonnant. L’athlétisme en fournit un exemple. « Les sessions du matin commencent à 8h30, ce qui veut dire qu’il faut être présent dès 6h30. Les épreuves durent jusqu’à 13 heures, avant de reprendre à 16 heures. Mais le break de trois heures ne donne pas le temps de rejoindre son hôtel. Et elles se terminent à 23 heures. C’est très long et c’est tous les jours », rapporte cet ingénieur du son belge, qui a notamment travaillé sur les Mondiaux de 2011 en Corée du Sud.

Au demeurant, il est courant que des événements internationaux fassent appel à des ressources extérieures, à la demande parfois des organisations sportives elles-mêmes. Ainsi, l’Union cycliste internationale (UCI), soucieuse d’uniformiser la production de toutes les manches de la Coupe du monde et du championnat du monde de cyclo-cross, impose le même réalisateur. Et des équipes étrangères peuvent offrir une plus grande valeur ajoutée dans le traitement de certains sports, comme les Suédois ou les Norvégiens sur le biathlon.

« Dumping social » et salaires

Pour autant, le principal motif de ce recours à l’international est d’ordre économique. Comme lors du championnat du monde de hand-ball à Paris, en 2001, filmé par des équipes et des cars espagnols, moyennant des prix alors inférieurs de 30 % à ceux pratiqués par les Français.

Plus récemment, durant l’été 2012, la production des matchs de Ligue 1 sur beIN Sports, confiée à l’espagnol Mediapro et sa filiale française Imagina, ranima la polémique. Le « collectif des techniciens intermittents de l’audiovisuel » avait alors accusé le prestataire de « dumping social » en favorisant l’emploi de « techniciens espagnols ou portugais » au détriment de « techniciens français qualifiés », et dénoncé une baisse des salaires.

Pour une pige de 8 heures, ceux-ci varient selon l’ancienneté et les acquis de certains. Ainsi, les minima conventionnels, révisés pour la dernière fois en juillet 2015 à l’heure où nous bouclons, s’échelonnent entre 157,15 € (barème M1) et 165 € (barème M2) pour un cadreur, un technicien vidéo ou encore une scripte. À quoi s’ajoute un tarif super dérogatoire, qui s’applique uniquement les jours de direct sur des opérations en extérieur, fixé à 207,74 € brut sur le service public, et entre 225 et 231 € sur d’autres chaînes pour un cadreur, par exemple, et 300 € pour un truquiste. Sans compter, le cas échéant, une majoration de 50 % les dimanches et jours fériés, qui passe à 100 % le 1er mai, et le paiement des heures supplémentaires ou des indemnités de transport, calculées en fonction du temps de voyage et du lieu de production.

Comme les cadreurs et les opérateurs ralentis, les réalisateurs comptent parmi les personnels dits « artistiques ». À la base, ce sont des intermittents comme les autres, qui ont le droit de travailler pour différentes chaînes, sauf ceux qui sont liés par un contrat d’exclusivité. Celui-ci fixe leur rémunération et leur garantit un certain volume de prestations en extérieur ou de plateaux télé par an, avec la possibilité d’en faire plus.

À Canal +, par exemple, ils sont cinq dans ce cas : deux pour le rugby (Laurent Daum, Sami Chatti) et trois pour le football (Jean-Jacques Amsellem, Laurent Lachand, Jérôme Revon). Ce dernier est l’un des rares en France à avoir monté sa société de production. À l’étranger, en revanche, nombreux sont ses confrères à avoir franchi le pas. À l’image du suédois Johan Bernhagen, spécialiste reconnu de l’athlétisme et du biathlon, à la tête de NCP.

Des contrats à géométrie variable pour les réalisateurs

En charge de dispositifs lourds et complexes sur le sport « premium », les réalisateurs contribuent, pour une part essentielle, à l’image de la chaîne dans l’opinion. Du coup, leurs cachets n’ont rien à envier à ceux des commentateurs et autres consultants-vedettes. Ainsi, selon notre enquête, les mieux payés empochent entre 200 000 et 400 000 € de gains annuels, lesquels, outre des prestations en extérieur, incluent éventuellement des émissions de plateau, une activité de conseil auprès d’instances sportives et des piges à l’international, payées au forfait entre 7 000 et 24 000 € pour un événement spécial, genre Tour cycliste ou autre.

Ces salaires ne correspondent pas seulement au travail fourni lors de la compétition, mais aussi à celui effectué en amont, typiquement pour le Tour de France. La préparation de la Grande Boucle commence avec les débriefings de l’édition précédente, à l’automne, et se poursuit sur le terrain, dès le mois de janvier, avec deux semaines de repérages, puis une en février, une en mars, une en avril et une dernière en mai. Ensuite, avec l’aide de son assistante, le réalisateur s’attèle à consigner dans un road-book les informations qui serviront aux pilotes hélico et moto. Au final, le Tour l’occupe contractuellement cent à cent dix jours par an.

Pour les autres courses de la saison cycliste française, chaque jour de direct est payé 1 250 €. De son côté, pour filmer les passing-shots et les services-volées des stars du tennis, le réalisateur en charge de la coordination du tournoi de Roland-Garros émarge à 2 000 € par jour, et ses collègues à 1 800 ou 900 €, selon qu’ils officient sur le Central ou le Lenglen, ou sur un court annexe.

Service public oblige, « ces salaires relèvent d’un barème extrêmement précis, selon le type de sport, le prestige de l’événement, l’importance du dispositif, l’horaire de diffusion, etc., couvrant une quarantaine de cas et validé chaque année par un contrôleur d’État, tout comme les cachets au-dessus de la norme, typiquement celui du réalisateur du Tour de France, qui bénéficie d’un contrat annuel estimé à 100 000 € », explique un proche du dossier.

De la même manière, un réalisateur de foot touchera 2 500 € pour un match « premium » en prime time, 1 800 € pour une rencontre à sept caméras sur France 4, par exemple, et 1 000 à 1 200 € pour un décrochage régional.

Même si certains sont payés 400 € la prestation, ces niveaux de rémunération sont, dans l’ensemble, supérieurs à ce qu’ils sont à l’étranger, notamment en Europe, où les salaires, typiquement pour des opérations orchestrées par l’UER, commencent à 200 € et oscillent entre 600 et 2 000 € par jour pour les réalisateurs, dont la rémunération moyenne n’excède pas cependant 1 000 €.

CDDU pour tous

Pour un employeur privé, le coût final se situe quelque part entre 35 et 55 % de son chiffre d’affaires. « Dans mon cas, les personnels intermittents représentent une masse salariale annuelle de 700 000 à 800 000 €. Sur les gros mois, avec deux cents intermittents pour la partie production, je suis à 100 000 €. Et à 15 000 € sur d’autres, avec une trentaine d’intermittents », détaille Vincent Wathelet, président de CIS SAM, une société monégasque qui dispose d’un fichier de mille noms pour des prestations dans le monde entier.

Autre exemple : AMP Visual TV consacre aux salaires de ses personnels (permanents et intermittents) 46 % de son chiffre d’affaires (108 millions d’euros), dans lequel l’activité sport, cars-régies et HF confondus, pèse 53 millions d’euros (49 %). Maintenant, dans la masse salariale de l’ensemble des intermittents, la part de ceux travaillant sur le sport entre pour 63 %, soit 14 400 000 € sur le dernier exercice comptable (1er avril 2015/31 mars 2016).

Pour compléter ses équipes de permanents sur les plateaux ou en extérieur, le prestataire embauche 3 000 intermittents par mois en moyenne, dont 1 900 pour le sport, sous contrat à durée déterminée d’usage (CDDU), ce pour quoi il a d’ailleurs obtenu la certification sociale.

Comme aide à la planification de quelque 4 500 tournages par an, dont parfois plus de quarante par semaine pour le sport, AMP Visual TV utilise un fichier de 2 600 noms. Ce précieux outil permet d’avoir une cohérence dans le choix des intermittents afin de limiter les frais de déplacement. Sauf que, sur certaines productions, le réalisateur a encore le pouvoir de choisir ceux avec lesquels il souhaite travailler, quitte à réduire le nombre de caméras, dans un contexte de resserrement budgétaire, et à laisser des personnels locaux, dont de nouveaux entrants, voire des permanents, désœuvrés.

« Aujourd’hui, certains n’arrivent plus à trouver assez de jours de travail en province et migrent vers les grandes villes, explique Gilles Sallé, son président. D’où un appauvrissement des ressources en local. Cela concerne surtout les personnels artistiques, moins polyvalents que les techniciens. C’est cette population qui nous fait parfois défaut et que nous devons renouveler sur nos agences. » [ndlr : Paris, Metz, Lyon, Toulouse, Nantes et Les Sables-d’Olonne].

En revanche, peu d’intermittents sont directement employés par les chaînes. Ainsi peu d’intermittents sont directement employés par les chaînes. Ainsi, lors du dernier Dakar, sur une équipe de vingt-quatre personnes en charge de la production du signal privatif de France Télévisions, cinq seulement relevaient de ce statut, contre dix-neuf permanents.

Tous sont sous CDD d’usage. Mais si certains, comme une scripte, un assistant-réalisateur ou un régisseur, sont directement payés par le donneur d’ordre, d’autres ne le sont pas. « Il paraît logique que ce soit le prestataire qui paye les intermittents, cadreurs et opérateurs ralentis en tête, dès lors que ceux-ci sont rattachés au car et exploitent son matériel », justifie Francis Cloiseau, directeur adjoint des sports, en charge de la production.

Un statut avec ses limites et ses codes

L’autre raison est que, sur France Télévisions en l’occurrence, un intermittent ne peut pas dépasser 140 jours de travail par an. Et ce, afin d’éviter à l’entreprise toute demande d’intégration en CDI.

Dès lors, « on ne peut pas interdire aux gens d’aller travailler ailleurs, réagit le responsable. Aucun des intermittents que nous employons n’a ce type de contrainte, ce qui n’est pas forcément le cas partout. » Ainsi, à l’aube des années 90, alors que le foot était l’enjeu d’une sourde rivalité entre TF1 et Canal +, les pigistes qui travaillaient pour la chaîne du groupe Bouygues étaient menacés d’être tricards chez le concurrent. « Quand je suis de bonne humeur, ça m’amuse de retrouver ailleurs jusqu’à des cameramen formés chez nous. Quant aux mauvais jours... », reconnaissait un jour Charles Biétry, alors patron des sports de Canal +. Preuve que le « mercato » des intermittents a ses limites et ses codes, en dépit d’un statut qui, en théorie, leur permet d’avoir différents employeurs.

D’autre part, ceux qui passent du statut d’intermittent ou d’indépendant à celui de permanent sont rares. Ainsi, depuis 2012, les sports de France Télévisions n’ont connu qu’un seul exemple, celui d’un assistant-réalisateur. De même, au cours de ces quatre dernières années, cinq free-lances, qui avaient commencé à travailler pour EPC sur des opérations de host broadcasting dans des rôles de coordination ou de project management, sont devenus des collaborateurs permanents de l’UER.

La prime aux plus expérimentés

De son côté, AMP Visual TV assure être le premier contributeur français en volume de travail intermittent avec 1,2 million d’heures par an, dont près de la moitié pour le sport. Maintenant, « si nous avons soutenu la croissance de nos parts de marché, nous avons aussi “ staffé ” l’entreprise afin de limiter le recours aux intermittents parce que le législateur nous l’imposait, il voulait que nous ayons beaucoup plus de permanents », concède Gilles Sallé. Depuis 2007, deux cents emplois ont ainsi été créés, parmi lesquels dix à quinze techniciens recrutés chaque année.

Pour ces derniers en particulier, la formation s’est professionnalisée, avec la création de filières audiovisuelles post-bac. Pour d’autres, elle passe notamment par les réalisateurs. Ainsi, Jean-Maurice Ooghe, qui réalise La Grande Boucle pour France Télévisions, apporte un soin particulier tant au choix des cameramen qu’à celui des pilotes moto, à l’heure de renouveler son équipe. Pour ce faire, il monte de fausses courses et procède à des castings, avec mouvements de caméra imposés.

« J’ai dû en organiser quatre ou cinq depuis que je fais ce métier et je vais en refaire un cette année, précise-t-il. Ces castings s’adressent à des professionnels déjà confirmés que je vais former au travail sur une moto. Ensuite, je les teste en conditions réelles sur une course. Ainsi, le dernier cameraman que j’ai sélectionné était avec moi sur le Tour d’Abu Dhabi, à l’automne dernier, et lors du dernier Paris-Nice, avant de le lancer, d’ici à deux ans peut-être, sur le Tour de France. »

Même si la concurrence est plus forte qu’autrefois, les chaînes et les prestataires fidélisent les plus expérimentés, quitte à freiner le recrutement de nouveaux entrants. « Ce sont des métiers où il est difficile de faire sa place, convient le réalisateur. Il y a un certain nombre de personnes qui travaillent énormément et d’autres qui ont beaucoup de mal à trouver du travail. Il n’y a pas une répartition homogène ou pseudo-équitable de l’activité. »

En fait, le constat n’est pas nouveau. Voici une quinzaine d’années déjà, une source syndicale évoquait un « milieu du sport à la télé » et avançait que « soixante cameramen font 80 % des émissions sportives ».

Au cours de cette période, pourtant, le volume de production a augmenté, jusqu’à faire du sport un programme permanent quand, autrefois, ses manifestations avaient lieu pendant les week-ends. Désormais, le sport d’élite, voire celui des divisions inférieures (Ligue 2, Pro D2...), squatte les écrans du lundi au dimanche, de même que des compétitions féminines et d’autres encore. « Vous avez aussi toutes les réunions hippiques qui font travailler entre cinq et dix cadreurs par réunion. Et ce, tous les jours de la semaine, voire deux fois par jour en province », souligne Gilles Sallé.

Multiqualification et hyperspécialisation

Reste que cette multiplication des tournages est invalidée par une réduction des moyens mis en œuvre, assure l’un des acteurs du dossier, avant d’énumérer : « Moins de caméras sur le basket et le hand-ball, par exemple, qui sont devenus les parents pauvres du sport collectif. Moins de caméras sur le rugby également. Moins d’assistants son et vidéo, plus de scripte ni d’assistant-réalisateur sur certains tournages, plus de truquiste non plus, et un réalisateur seul aux manettes. »

Dans ce contexte, la multiqualification et l’hyperspécialisation apparaissent comme des antidotes plus ou moins efficaces à la précarité. Dans le premier cas, il n’est pas rare, par exemple, qu’un cadreur sur une production sport le week-end endosse l’habit du JRI la semaine avec du matériel ENG pour une agence de presse, ou encore qu’un IP logger ou opérateur ralentis sur le football devienne cadreur ou monteur sur d’autres prestations.

Par ailleurs, des événements comme les Jeux olympiques, par souci d’économie et compte tenu de leur éloignement, favorisent également l’emploi de personnels multiqualifiés. Ainsi, un cadreur saura aussi faire de la transmission.

Pour autant, « sur les grands directs, nous sommes encore sur des métiers extrêmement spécialisés », note Jean-Maurice Ooghe. Certains cadreurs, par exemple, sont experts sur les portables ou le plan large, sans parler des grues, steadicams et autres matériels spécifiques pour l’utilisation desquels les opérateurs ont parfois droit à une prime (130 € pour un match sur beIN Sports). Reste que « nous ne sommes jamais approchés par les ingénieurs et concepteurs pour évaluer et aider au développement de nos outils de travail, qui ne sont pas toujours ergonomiques et efficaces en extérieur », se désole l’un d’eux.

« Le travail est irrégulier, mais il n’est pas précaire pour ceux qui sont les meilleurs », nuance l’une des parties prenantes. Et encore, plus que d’autres productions, « le sport est l’activité sur laquelle nous avons aujourd’hui un peu de visibilité puisque nous avons des contrats annuels ou pluriannuels qui nous permettent de prendre des engagements de volume auprès d’intermittents en leur disant : à Saint-Etienne, par exemple, nous viendrons une fois tous les quinze jours pendant dix-neuf matchs », enchaîne Gilles Sallé. Ainsi, les plus expérimentés participent à une centaine de tournages et totalisent quelque 1 200 heures de travail par an.

Toutefois, tout peut être remis en cause au gré du renouvellement ou non de ces contrats. Ainsi, un intermittent qui ne travaille plus sur un match « premium » du vendredi soir ou du dimanche soir sur Canal +, verra son salaire mensuel amputé de 35 %. Et il suffit que dans une région, une ou deux équipes quittent l’élite pour qu’une partie de l’activité disparaisse.

Vers une fluidité entre les métiers

Pour la majorité, la précarité reste donc un fait économique et social. D’autant que la tendance à la réduction des coûts conduit, par exemple, à remplacer certains cadreurs par des assistants, qui installent le matériel en amont, puis cadrent, avant de finir leur journée en aidant au démontage.

Les mutations technologiques en cours ou à venir pourraient encore accélérer cette fluidité entre les métiers. Jusqu’à bouleverser le cadre social et le modèle de production ? Ainsi, avec la montée de l’Ultra HD, le métier de cadreur aura-t-il encore une substance, quand il suffit qu’un opérateur zoome dans l’image pour proposer d’autres valeurs de plan ?

De la même manière, quelles conséquences porte en germe le projet, déjà ancien, de jumelage du plan large avec les caméras aux 18 mètres, ou encore la mise en place de dispositifs de suivi automatique sur des petits sports collectifs comme le volley-ball ? Enfin, verra-t-on encore des cars et des intermittents sur les stades, quand ceux de la nouvelle génération se dotent de moyens intégrés pour la production des images et le transfert des données par fibre noire et connexion IP, avec une main-d’œuvre employée à des postes de permanents ?

Un régime dérogatoire pour le Tour de France

Avec les Jeux olympiques, le Tour de France est l’autre événement pour lequel, chaque année, France Télévisions, après acceptation du comité d’entreprise et du CHSCT interne, demande une dérogation à l’Inspection du travail.

« Nous appliquons strictement la journée de repos hebdomadaire pour tous, y compris les commentateurs, plaide Francis Cloiseau. Se pose uniquement le problème de cette journée de repos, et seulement la première semaine du Tour, pour le réalisateur. Nous avons expliqué à l’Inspection du travail la spécificité de cette réalisation, rendant une rotation impossible sur une journée. Sur ce point, nous avons eu droit à des remarques, mais aucune action en justice n’a été engagée. » Contrairement à la rumeur.

D’autre part, les intermittents du Tour bénéficient d’un régime salarial spécifique avec une prime de 210 € versée à ceux présents sur l’intégralité de la course, et une indemnisation à 125 % des temps de transfert d’une étape à l’autre.

Quant aux notes de frais, le système est le même que pour les permanents (forfait au barème Urssaf ou frais de mission sur justificatifs plafonnés à quelque 25 € par repas, qui est la moyenne sur l’ensemble du Tour). En fait, pour la très grande majorité des personnels, dont 50 % environ d’intermittents, qui travaillent à la retransmission de l’événement, l’hébergement est directement pris en charge par France Télévisions.